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Dès lors qu’un accident du travail entraine le décès d’un salarié, la caisse primaire a l’obligation de diligenter une instruction avant de se prononcer sur le caractère professionnel de l’événement. En pratique, la mise en œuvre d’une telle mesure varie selon que le décès est immédiatement consécutif à l’accident ou s’il intervient postérieurement. La Cour de cassation vient de préciser les règles applicables.
Le Code de la Sécurité sociale dispose que les caisses primaires sont tenues de diligenter une instruction avant de se prononcer sur le caractère professionnel d’un décès survenu par le fait ou à l’occasion du travail.
Deux cas distincts en pratique
Si cette disposition laisse peu de place à l’interprétation, la pratique des caisses primaires permet de dégager deux cas.
Le premier concerne le cas des décès immédiatement consécutifs à l’accident. Ici, le décès est considéré comme la lésion résultant de l’accident.
Dans cette hypothèse, la caisse primaire ouvre une instruction préalable, conformément à la disposition précitée du Code de la Sécurité sociale.
Le second cas concerne le décès du salarié postérieur à l’accident. Ici, le décès n’est pas la conséquence immédiate de l’accident, le salarié pouvant présenter des lésions intermédiaires avant cette issue fatale.
Dans ce cas, la pratique montre que les caisses primaires procédaient en deux temps, se prononçant tout d’abord sur le caractère professionnel de l’événement originel, puis, sur celui du décès.
Or, si la caisse ouvre obligatoirement une instruction avant de se prononcer sur le décès, la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’accident originel peut intervenir sans enquête préalable, dès lors que les circonstances de survenance de l’événement ne permettent pas de douter de son lien avec le travail du salarié.
C’est typiquement l’espèce soumise à l’appréciation de la Cour de cassation dans son arrêt du 20 septembre dernier.
La connaissance du décès comme critère déterminant
Un salarié, victime d’une chute, décède une semaine plus tard. La caisse primaire reconnaît, dans un premier temps, le caractère professionnel de la chute. Cette décision intervient sans instruction préalable.
Puis, dans un second temps, elle se prononce sur le décès, après avoir diligenté l’enquête obligatoire prévue.
Or, il s’avère que l’information relative au décès du salarié a été portée à la connaissance de la caisse primaire avant qu’elle ne rende la première décision.
Confirmant l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 avril 2017, la Cour de cassation estime que la caisse primaire était tenue de procéder à l’enquête préalable obligatoire prévue par le Code de la Sécurité sociale, dès lors qu’elle était informée du décès du salarié avant sa décision initiale.
Plus que la consécration du caractère obligatoire de l’instruction en matière de décès, cet arrêt interdit donc aux caisses primaires de se prononcer sur le caractère professionnel d’un accident mortel sans procéder à une enquête, dès lors qu’elle en est informée avant que sa décision n’intervienne.
Il s’agit là d’une interprétation littérale des dispositions du Code de la Sécurité sociale, l’élément d’appréciation déterminant étant la connaissance du décès par l’organisme.
Ce dernier point imposera aux caisses primaires d’être particulièrement vigilantes dans le suivi d’un dossier, notamment lorsque les lésions initiales du salarié présentent un critère de gravité certain.
A l’inverse, si l’employeur entend se prévaloir de la solution de cet arrêt et invoquer un éventuel manquement de la caisse à ses obligations, il lui appartiendra de rapporter la preuve de la date à laquelle elle a été informée du décès du salarié.
Cour de cassation, 2e chambre civile, 20 septembre 2018, n°17-21.282 (si la caisse est informée du décès de la victime à la date de la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle, elle doit mener une enquête avant de rendre sa décision)