Alors que les gilets jaunes questionnent la représentativité syndicale et politique, Philippe Martinez est interrogé sur l'utilité de la CGT et les enjeux du congrès.
« La CGT sert toujours à défendre les travailleurs et les travailleuses qui subissent les désordres du monde. Mais ceux qui subissent aujourd'hui ne sont plus les travailleurs de son périmètre historique. Le problème aujourd'hui, c'est que la CGT rayonne sur 42 % du monde du travail. Elle engrange chaque année de 35 000 à 40 000 nouvelles adhésions et pourtant, le nombre de ses syndiqués baisse à 653 000 actuellement. Trop de salariés passent ou restent à la porte. »
« Nos structures ne sont plus adaptées au monde du travail. La création de syndicat de site n'avance pas, par exemple. On a commencé à ébaucher une réflexion sur l'organisation des structures en région, on pourrait, par exemple, avoir des antennes mobiles qui se déplacent au contact des salariés. Rien ne nous empêche dans les statuts de syndiquer des travailleurs Uber. »
« La CGT a besoin d'être plus à l'écoute du monde du travail. Si on ne fait rien, je suis très inquiet pour mon organisation. Les gilets jaunes qui agrègent des femmes, des retraités, des salariés de petites entreprises, des précaires sont le reflet de nos déserts syndicaux. Reste que dans plusieurs départements, comme en Charente-Maritime, dans le Loiret, en Haute-Garonne, la CGT et les Gilets jaunes nouent des liens et échangent ».
Quelle place de la CGT dans le syndicalisme international ?
Interrogé sur la place de la CGT au sein de la CES (Confédération européenne des syndicats) alors que des fédérations poussent en interne à se rapprocher de la FSM (Fédération syndicale mondiale), Philippe Martinez rappelle que « la CGT participe activement au sein de la CES, même si on lui reproche d'être un syndicalisme de compromis. La CES est une organisation importante, riche de sa diversité syndicale. Je ne crois pas que la FSM soit une organisation de masse, démocratique. »
« Nous avons besoin d'un syndicalisme européen fort pour peser sur une harmonisation salariale, sur une baisse du temps de travail. Par exemple, nous pourrions militer pour faire en sorte que les marchés publics européens intègrent une charte sociale basée sur les conventions de l'OIT (Organisation Internationale du travail) ».
Propositions CGT et position vis-à-vis du gouvernement
Philippe Martinez revient aussi sur le boycott du sommet social organisé par le gouvernement Philippe sur le travail, l'emploi et les grandes transitions. « Matignon nous a répondu que l'ordre du jour était de mettre en œuvre les décisions du président de la République. Ce n'est pas notre truc. La CGT ne pratique pas la politique de la chaise vide sur l'assurance chômage, les retraites. Sur ce dernier sujet, on a continué de porter nos propositions en dépit des annonces contraires entre la ministre de la Santé, Agnès Buzyn et le haut commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye. En dépit aussi des annonces de Macron, qui évoque un système de décote et de fait, un recul de l'âge effectif de départ en retraite ».
Revenant sur les violences policières du 1er mai, Philippe Martinez annonce avoir écrit au ministère de l'Intérieur pour lui raconter sa manifestation. « Le cortège de la CGT a été attaqué à deux reprises alors que les ballons CGT, son service d'ordre étaient parfaitement identifiés. J'ai demandé une enquête publique au ministère de l'Intérieur, nous devons avoir une explication claire sur qui a donné l'ordre d'agresser le cortège syndical ».