Ordonnance du 20 mai 2020 modifiant l’ordonnance du 25 mars 2020

Ordonnance du 20 mai 2020 modifiant l’ordonnance du 25 mars 2020

L’ordonnance du 20 mai précise qu’en cas de partage des voix, l'affaire est renvoyée devant un juge professionnel, qui statue seul, ce qui est contraire au paritarisme de la juridiction prud’homale. Le magistrat devra seulement avoir recueilli par tout moyen l'avis des conseillers présents lors de l'audience de renvoi en départage. Ce n’est que si au terme de l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, le juge n'a pas tenu l'audience de départage, que l'affaire est renvoyée à la formation restreinte présidée par ce juge.
Les audiences à juge unique ou en formation restreinte ne comportent pourtant pas de garanties procédurales suffisantes pour les justiciables, et le gouvernement s’assoit tout simplement sur le paritarisme des CPH !
Passage direct en BJ faute de réunion du BCO dans les trois mois de la saisine
Lorsque, trois mois après la saisine du conseil de prud'hommes, l'audience du bureau de conciliation et d'orientation (BCO) n'a pas eu lieu ou le procès-verbal de conciliation établi ou qu’une ordonnance n’a pas été prise, l'affaire est, en l'absence d'opposition du demandeur, renvoyée directement en bureau de jugement (BJ) à une date que le greffe indique aux parties par tout moyen.
Il y a un risque que cette mesure dérogatoire permettant de contourner le BCO soit pérennisée après la fin de l’état d’urgence sanitaire, et soit alors un premier pas vers la suppression de la conciliation ce qui n’est pas acceptable.
Accès aux juridictions
Les chefs de juridiction définissent les conditions d'accès à la juridiction, aux salles d'audience et aux services qui accueillent du public permettant d'assurer le respect des règles sanitaires en vigueur. Ces conditions sont portées à la connaissance du public notamment par voie d'affichage.
Le juge ou le président de la formation de jugement peut décider, avant l'ouverture de l'audience, que les débats se dérouleront en publicité restreinte ou, en cas d'impossibilité de garantir les conditions nécessaires à la protection de la santé des personnes présentes à l'audience, en chambre du conseil (c’est à dire sans public). Dans les conditions déterminées par le juge ou le président de la formation de jugement, des journalistes peuvent assister à l'audience, y compris lorsqu'elle se tient en chambre du conseil.
Lorsque le nombre de personnes admises à l'audience est limité, les personnes qui souhaitent y assister saisissent par tout moyen le juge ou le président de la formation de jugement.
Audience par visioconférence ou téléphone
Pour rappel, le juge, ou le président de la formation de jugement, peut décider que l'audience ou l'audition se tiendra en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle permettant de s'assurer de l'identité des personnes y participant et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. Cette décision n’est pas susceptible de recours.

En cas d'impossibilité technique ou matérielle de recourir à un tel moyen, le juge peut décider d'entendre les parties et leurs avocats, ou la personne à auditionner, par tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique, permettant de s'assurer de leur identité et de garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges. Cette décision n’est pas susceptible de recours.
Les membres de la formation de jugement, le greffier, les parties, les personnes qui les assistent ou les représentent - par exemple les défenseurs syndicaux - les techniciens et auxiliaires de justice ainsi que les personnes convoquées à l'audience ou à l'audition peuvent se trouver en des lieux distincts. Le juge organise et conduit la procédure. Il s'assure du bon déroulement des échanges entre les parties et veille au respect des droits de la défense et au caractère contradictoire des débats. Le greffe dresse le procès-verbal des opérations effectuées. Les moyens de communication utilisés par les membres de la formation de jugement garantissent le secret du délibéré.
Cette ordonnance précise et étend les possibilités des juridictions de recourir à des procédés de télécommunication, notamment pour les auditions.
Pour la CGT, les audiences par téléphone ne sont pas acceptables, car elles ne permettent pas de garantir l’identité des parties. Quant aux audiences par visioconférence, elles ne doivent être utilisées que pour les affaires urgentes et dans le cas où les mesures de protection physique ne peuvent pas être mises en place.
Procédure sans audience
Lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience. Cette décision qui avait déjà été introduite par l’ordonnance du 25 mars 2020 peut désormais intervenir à tout moment de la procédure. Le juge en informe les parties par tout moyen.
Notons que certaines procédures devant le pôle social du tribunal judiciaire et les procédures d’appel qui s’en suivent sont concernées, mais cela ne concerne pas les conseils de prud’hommes ni les appels après jugement prud’homal.
À l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé, les parties disposent d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans audience. A défaut d'opposition, la procédure est exclusivement écrite. La communication entre les parties est faite par notification entre avocats. Il en est justifié dans les délais impartis par le juge.
Ces dispositions s'appliquent aux affaires dans lesquelles la mise en délibéré est annoncée avant l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire.

D’une part, elles ne peuvent pas être appliquées devant les CPH puisque certains salariés se défendent sans avocats. Donc des audiences physiques sont indispensables aux prud’hommes. D'autre part, il faut de toute façon les éviter car elles portent encore une fois atteinte aux garanties procédurales.
Convocation des parties, communication et notification des décisions
Sans préjudice des dispositions relatives à leur notification, les décisions peuvent être portées à la connaissance des parties ou des personnes intéressées par tout moyen. Cette mesure avait été prise par l’ordonnance du 25 mars 2020. De plus, désormais, les convocations et les notifications qui sont à la charge du greffe sont adressées par lettre simple lorsqu'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception est prévue.
En conclusion, cette ordonnance rend pérenne dans le temps des mesures attentatoires au paritarisme et aux droits procéduraux. Le tout sans aucune consultation des organisations syndicales, alors que nous avions expressément demandé à être entendu.