Sommet du G7 à Biarritz : un autre monde est pourtant possible

Sommet du G7 à Biarritz : un autre monde est pourtant possible
Fin du G7 qui s'est tenu à Biarritz, en France, le weekend dernier. Une nouvelle rencontre des chefs d'État ou de gouvernement des sept puissances économiques de la planète, qui poursuivent leurs politiques d'austérité. Écartés des débats, les altermondialistes ont tenu un contresommet.

Le grand raout biarrot du G7, rassemblant les chefs d'État et de gouvernement de l'Allemagne, du Canada, des États-Unis, de la France, de l'Italie, du Japon et du Royaume-Uni, vient de se terminer.

Qualifié de « grande réussite » par Donald Trump quand Emmanuel Macron, assurant qu'il faut rester « humble » en la matière, préfère insister sur « la grande unité et l'esprit positif sortis de ce G7 », ce millésime 2019, à l'image des précédents, garde son goût amer.

Certes, le coup de théâtre, coup de poker qu'ont constitué l'arrivée « surprise » du ministre des Affaires étrangères iranien et l'annonce d'une éventuelle rencontre à venir entre les présidents américain et iranien n'est pas une mauvaise nouvelle en soi. Tout comme l'intrusion inattendue dans les débats de la crise écologique annoncée par les feux qui ravagent l'Amazonie, venue rappeler brutalement, et concrètement, l'urgence des questions environnementales et climatiques.

Pompiers pyromanes

Reste que derrière les effets de manche et les belles paroles, le compte n'y est pas. Si unité il y a eu, c'est bien sûr la volonté de ne pas remettre en cause un système économique libéral et « multilatéral », soumis aux bons vouloirs des multinationales et ne profitant qu'à un nombre restreint. Ce, au prix d'une destruction systématique de l'environnement et au mépris des droits humains et/ou sociaux fondamentaux.

Car si la forêt amazonienne brûle, ce n'est pas parce que Jair Bolsonaro « a menti » comme l'affirme Macron, le programme du candidat Bolsonaro était assez clair en la matière, si elle brûle, c'est surtout pour faire place à la culture du soja, transgénique, qui nourrit le cheptel européen.

La France et ses grands groupes, tout comme ses partenaires du G7, préférant manifestement jouer un rôle de pompier pyromane, tant du point de vue environnemental que social, comme l'illustrent la série de traités de libre-échange internationaux passés par l'Europe ou leurs partenaires non européens du G7.

Difficile dans ces cas de parler de réduction des inégalités, ce qui était quand même à l'ordre du jour de ce sommet. D'autant moins que ceux censés être les mieux à même d'aborder ces sujets, syndicats, partis politiques organisations non-gouvernementales, associations de la société civile, altermondialistes, gilets jaunes… étaient repoussés à Irun, Bayonne ou Hendaye, à plusieurs kilomètres d'un Biarritz ultrasécurisé et entièrement barricadé.

L'altermondialisme en débats

Les mouvements altermondialistes, qui « contestent depuis longtemps la légitimité du G7, où des pays parmi les plus riches décident pour l'ensemble du monde » ont cependant réussi à se retrouver pour débattre d'une alternative aux politiques d'austérité des chefs d'État et de gouvernement des pays du G7.

En jeu, de nombreux débats « pour un autre monde », en sortant « du capitalisme et de la dictature des multinationales », autour des frontières et de leur abolition. « contre la destruction de notre planète (…), pour un monde radicalement féministe », pour le respect de « la diversité et de la liberté des peuples, pour un monde décolonial et sans discriminations (…), une démocratie sociale et les mêmes droits pour toutes et tous (…)un monde juste et basé sur la solidarité entre les peuples, contre les guerres (…) »…

Déploiement de forces

Pour autant, un déploiement de forces — quelque 13 200 policiers et gendarmes — a obligé les organisateurs du contresommet à annuler les manifestations prévues le dimanche pour « encercler » le G7. « Une restriction injustifiable de la liberté de rassemblement et de mouvement », selon Amnesty International alors que Ligue des droits de l'Homme parle d'« intimidations inacceptables », après la garde à vue de deux de ses observatrices « porteuses de matériel de protection, casques et lunettes, dans leur sac ». Intimidations dont ont aussi été victimes plusieurs journalistes.

Quant au secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, invité à s'exprimer lors d'une conférence intitulée « Fin du monde, fin du mois, même combat » organisée lors du contresommet, il rappelait que : « Avec les forêts qui brûlent en Amazonie, on a pu voir que la responsabilité du capital et des capitalistes est essentielle ». Un soutien sans équivoque à la première revendication des organisateurs de ce contresommet qui, n'en déplaise à Emmanuel Macron et ses amis du G7, appelle à sortir « du capitalisme et de la dictature des multinationales ».

Les organisateurs du contre-sommet au G7, qui attendent 12.000 participants, ont assuré lundi 12 août lors d’un point de presse qu’ils n’entendaient provoquer aucune dégradation ou confrontations avec les forces de l’ordre lors des manifestations prévues à l’occasion du sommet des chefs d'États à Biarritz (24 au 26 août).

« Nous agirons avec calme et détermination. Nous ne dégraderons rien, nous ne participerons pas à la surenchère » , a affirmé Aurélie Trouvé, membre de la plateforme Alternatives G7 au cours d’une conférence de presse à Hendaye. « Nous n’entrerons pas en confrontation avec les forces de l’ordre et s’il y a des violences répressives, nous opposerons des techniques de résistance non-violentes » , a ajouté la militante lors de cette présentation des « enjeux » et du programme du contre-sommet. Lors d’une visite ministérielle le 4 juillet dernier, à Biarritz, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner avait prévenu que « toute manifestation violente » pendant le G7 serait « neutralisée » .

Le contre-sommet veut dénoncer le « cynisme à toute épreuve » du président Emmanuel Macron qui « ose afficher » comme objectif de ce sommet « la lutte contre les inégalités » , selon les organisateurs. Les opposants disent vouloir « éteindre l’incendie de la planète perpétré par ces 7 pyromanes » .

Dès le 19 août, les anti-G7 prendront leurs quartiers à Urrugne, commune voisine d’Hendaye, à quelques kilomètres de la frontière espagnole, pour y installer leur camp de vie. De là, des navettes conduiront les quelque 12.000 participants attendus sur les principaux lieux de conférences et ateliers, à Irun et Hendaye, qui débuteront le 21 août. Plus de 200 intervenants pour 40 conférences et 50 ateliers sont annoncés pendant trois jours. Ainsi, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez sera présent le jeudi pour une conférence intitulée « Fin du monde, fin du mois, même combat » . Lors des multiples conférences et ateliers, il sera notamment question de migrations, de luttes féministes, d’urgence climatique ou d’autoritarisme.

Le 24 août, jour du lancement du sommet des chefs d'États à Biarritz, une grande manifestation s’élancera d’Hendaye pour rejoindre Irun, de l’autre côté de la frontière. Le lendemain, des actions « d’occupation des places publiques » auront lieu dans sept communes limitrophes de la cité balnéaire, que les organisateurs veulent sans dégradation ni violence.

Les ONG non grata au sommet officiel
Selon le site de l’ONG Réseau Action pour le Climat, « à ce jour (9 août), le gouvernement n'est prêt à accorder qu'une dizaine d'accréditations aux ONG, soit la plus faible représentation des organisations de la société civile depuis 2005. Les conditions d'accès de la société civile à la presse pendant le sommet restent floues. Ces restrictions rompent avec une longue tradition d'ouverture à la présence de la société civile lors des sommets du G7. » Pour Philippe Jahshan, président de Coordination Sud,  « si la France a communiqué à plusieurs reprises sur son souhait d'associer tous les acteurs et actrices de la société aux discussions, le sommet de Biarritz ne reflète pas cette intention et suscite l'incompréhension des ONG. La société civile dans son ensemble et dans toute sa diversité doit être représentée au sommet. Il ne nous a été proposé que 10 accréditations. Est-ce sérieux ? »